L'éducation, une formation tout au long de notre vie

L'éducation, une formation tout au long de notre vie

Les nouvelles technologies rendent les compétences obsolètes de plus en plus rapidement. En même temps, nous travaillons plus longtemps. Pour répondre à l’équation de l’emploi, il est nécessaire de développer la formation tout au long de la vie.

La question de l’inadéquation des compétences

L’état du marché du travail s’est nettement amélioré ces dernières années dans les pays développés et une preuve évidente de cela est la baisse marquée du taux de chômage.

Cela dit, des problèmes structurels subsistent, comme une forte inadéquation entre offre et demande de compétences. Les employeurs peinent à recruter des employés disposant des compétences dont ils ont besoin. Les mégatendances vont accroître le besoin de formation continue.

Quand on interroge les petites entreprises aux États-Unis et en Europe1 du problème le plus important auquel elles font face, leur réponse n°1 n’est ni le manque de demande, ni la régulation excessive ou la fiscalité trop élevée, mais la difficulté à recruter du personnel compétent.

« Aux États-Unis, on compte moins de 6 millions de chômeurs, mais 7 millions de postes ouverts. »

L’une des raisons pour lesquelles le chômage ne baisse pas plus rapidement dans un contexte aussi favorable est que les chômeurs n’ont pas les compétences qui sont recherchées par les employeurs. Ce phénomène porte le nom de « skills mismatch ».

Allongement de la présence sur le marché du travail

La formation continue, c’est-à-dire, la formation des individus qui sont déjà dans la population active, est l’un des moyens de résoudre cette inadéquation entre offre et demande de compétences. Et les mégatendances (allongement de la durée de la vie, progrès technologiques) vont exacerber ces besoins de formation continue.

Pour des raisons de financement des pensions de retraite, l’allongement de la durée de la vie va pousser les gouvernements à progressivement repousser l’âge de départ à la retraite.

Au Japon, le Premier ministre Shinzo Abe a déclaré que l’une des priorités de son gouvernement pour les prochaines années serait de permettre à la population de travailler plus longtemps et de ne toucher sa pension de retraite qu’à partir de 70 ans.

Dans ce pays, le taux de participation des plus de 65 ans a grimpé de plus de 5 points depuis la fin 2010, à près de 25% de la population.

Globalement, le vieillissement de la population va s’accompagner d’une période de vie active plus longue. Le Bureau International du Travail prévoit que le taux de participation des plus de 65 ans augmentera nettement aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne d’ici 2030.

Surtout, l’allongement de la présence sur le marché du travail impliquera davantage de transitions en cours de carrière : d’un poste à un autre dans une même entreprise, d’une entreprise à une autre2, d’un secteur à un autre. Les reconversions seront plus fréquentes et nécessiteront dans la plupart du temps l’acquisition de nouvelles compétences.

Vers de nouvelles compétences

Par ailleurs, les évolutions technologiques précipitent l’obsolescence des compétences, c’est-à-dire le fait que les compétences deviennent progressivement hors d’usage et moins en phase avec les besoins des entreprises.

Le Cedefop (Centre Européen pour le DEveloppement de la FOrmation Professionnelle), une agence de l’Union européenne, explique que l’obsolescence des compétences est une conséquence des restructurations industrielles et du changement des besoins de compétences dans les secteurs ayant fortement recours aux nouvelles technologies (par exemple, technologie de l’information et de la communication, finance, activités scientifiques), dans lesquels les compétences peuvent rapidement être dépassées.

« Dans l’Union européenne, 46 % des adultes en emploi pensent qu’il est vraisemblable ou très vraisemblable que plusieurs de leurs compétences seront dépassées dans les cinq prochaines années. »

Le remplacement total ou partiel d’emplois par l’automatisation accroît ou va accroître le besoin de formation en cours de carrière, car les employés devront s’adapter à de nouvelles fonctions, voire à de nouveaux secteurs d’activité3.

L’OCDE estime par exemple que 14 % des emplois dans les pays de l’OCDE sont « à risque » face à l’automatisation et que 32 autres % pourraient être modifiés de façon substantielle4. Des emplois vont disparaître et d’autres apparaître avec l’automatisation et la robotisation. Surtout, les compétences de demain seront différentes des compétences d’aujourd’hui, ce qui occasionnera de forts besoins de formation continue et de reprises d’étude.

Prise de conscience

Ainsi, à cause des évolutions technologiques et du vieillissement de la population, la formation tout au long de la vie s’imposera de plus en plus comme un impératif économique. Le rapport  » Future of skills and Lifelong Learning  » publié par le Government Office for Science, un organe de conseil du gouvernement britannique, conclut : « La sécurité économique ne viendra pas du fait d’avoir un emploi à vie, mais du fait d’avoir la capacité de maintenir et renouveler les compétences adéquates grâce à la formation tout au long de la vie. »

Il faudra bien sûr des décisions fortes de la part des gouvernements occidentaux pour que la formation tout au long de la vie se développe encore davantage, mais il semble que ces derniers aient de plus en plus conscience des enjeux associés.

— Juliette Cohen & Bastien Drut, Stratégistes, CPR AM

Notes —
1. NFIB survey for the US and the SAFE survey from the ECB for the Eurozone.
2. See for instance the book « The 100-year life » from Lynda Gratton and Andrew Scott.
3. Allen J. et A. De Grip, 2012, « Does skill obsolescence increase the risk of employment loss ? », Applied Economics.
4. « Putting faces to the jobs at risk of automation », OECD, March 2018.
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